EXPLIQUER LA CRISE SANS DEMAGOGIE

Publié le par Mory

Il est temps de remettre un peu d’ordre dans ces débats sur la crise financière que nous traversons. Lorsque j’explique les origines, manifestations et conséquences de cette crise à des non spécialistes, ils sont souvent étonnés au regard de ce qu’ils entendent dans les médias ou auprès des hommes politiques.

En fait, c’est très simple. Les médias veulent à n’importe quel prix faire de l’audience et ils annoncent des chutes d’indices comme ils annonceraient une violente catastrophe aérienne   (ce sensationnalisme ne contribuera malheureusement pas au développement de la culture économique et financière en France). Quant aux hommes politiques, c’est une aubaine pour eux d’être populiste voire populaire en trouvant de nouveaux boucs émissaires que sont les banquiers et les marchés financiers. Tout ceci leur permet de masquer leurs graves insuffisances. Va-t-on sérieusement nous faire croire que nos hommes et femmes politiques ont découvert les hedge funds , l’effet de levier , les ventes à découvert et le fonctionnement des salles de marché le 15 septembre 2008 , jour du défaut de Lehman Brothers. On sait certes que nombre d’entre eux n’ont jamais mis les pieds dans une entreprise (bancaire ou industrielle)  et qu’ils seraient bien  en peine d’optimiser chaque année un résultat brut d’exploitation. Mais quand même……..

 

Il faut donc en revenir aux fondamentaux et expliquer les bienfaits des marchés financiers.

Cela revient à faire référence à deux métaphores qui sont souvent citées : 1/ Doit-on remettre en cause l’aéronautique parce qu’il y a des accidents d’avion ? 2/ Dans le même ordre d’idées un médecin doit-il casser le thermomètre pour soigner son patient ?

Eh bien non et, aussi paradoxal que cela paraisse  c’est en sauvant et réhabilitant les marchés financiers que l’on sortira de cette crise. Car, après tout, ne perdons jamais de vue l’essence même des marchés

Lorsque je dois expliquer le rôle et l'utilité des marchés et des banques à des « novices » voilà à  peu près comment je m'y prends.

1/ Le marché financier est naturellement le lieu où doivent se rencontrer des agents économiques à besoin de financement, des entreprises en général, et des  agents économiques à capacité d'épargne, type particuliers. L'horizon des agents à besoin de financement est de plusieurs années (financements à long-terme de projets industriels) tandis que l'épargne des ménages doit être liquide et de court terme. Cette différence dans l'horizon de temps rend l'échange et le fonctionnement du marché difficiles

2/Et c'est là que les banques interviennent. Ce sont les seuls agents qui peuvent transformer des ressources court-terme (dépôts à vue et comptes courants des clients) en crédits à moyen terme et long terme à l'économie. Les banques établissent le pont nécessaire entre les ménages et les entreprises (et  il ne sert à rien comme le font absurdement les politiques de les culpabiliser sur leur capacité à financer correctement l'économie). Car en la matière, les banques pourraient donner des leçons aux pouvoirs publics. N'oublions jamais que l'argent public injecté dans le capital des établissements financiers est de la dette que l'état devra tôt ou tard rembourser (à moins qu'il ne l'éteigne par la création de monnaie et l'inflation ; probable mais ça c'est plutôt la crise de 2040 ou 2050,  celle de l'insolvabilité des Etats, pas la peine d'en parler maintenant !!!) ….

En tout cas, les banques ont cette fonction de transformation. Alors oui nous utilisons l'argent des clients (et heureusement pour réemployer cette liquidité en crédits long terme) et dans le même temps,  nous supportons ces risques de transformation (risques de taux et de liquidité pas toujours évidents à gérer, mais ça c'est le métier de la Gestion de Bilan et c'est notre problème)

3/Les banques ne peuvent évidemment pas tout et les entreprises doivent aussi trouver des moyens de financement à encore plus long terme sur les marchés: capitaux et dettes subordonnées (donc  fonds propres)  ou/et dette obligataire. Et pour ce faire,  il faut des agents économiques prêts à immobiliser beaucoup de cash pendant longtemps : compagnies d'assurance, gérants de fonds (asset managers), caisses de retraite et fonds de  pension

A ce stade, on aura enfin compris que si l'on veut que l'économie continue à fonctionner et à créer des richesses, l'on doit pouvoir disposer de marchés financiers profonds, liquides et efficients

 

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